Sleeptalking est une vidéo réalisée par Pierre Huyghe en 1999 prenant pour point de départ le célèbre film d’Andy Warhol Sleep (1963), où l’artiste filmait le poète John Giorno pendant une durée de six heures. Pour son œuvre, Pierre Huyghe est allé retrouver l’acteur du film de Warhol pour l’interroger, comme il avait pu le faire avec Blanche-Neige-Lucie (1998), où il partit rencontrer Lucie Dolène, la femme qui fut la voix française de Blanche-Neige.

Ici, Pierre Huyghe réalise un enregistrement audio de John Giorno racontant ses souvenirs des années 1960 et du film d’Andy Warhol. Cette matière sonore est ensuite superposée sur les images de l’acteur, refilmé par Pierre Huyghe trente ans plus tard dans la même position que celle de l’œuvre de Warhol. Par un subtil procédé de morphing, on observe les traits de son visage actuel se fondre dans ceux de sa jeunesse. Aux rêves que suggérait le film originel succèdent désormais ceux plus concrets du poète dans les années 1960. Pierre Huyghe associe très clairement l’idée de rêve à l’utopie de la Beat Generation dont John Giorno fut un des principaux acteurs. Pierre Huyghe ne fait en aucun cas le constat d’un échec de ces utopies artistiques et politiques, mais observe davantage comment celles-ci se transformèrent peu à peu au cours des années, participant d’une renégociation constante du rapport au quotidien.

L’appareil Deux conversations, anciennement intitulé Daily, est une œuvre active qui se compose de deux éléments : d’une part, un diaporama diffusé en boucle, composé de quarante images extraites du film 2001, l’Odyssée de l’espace, et, d’autre part, une bande-son constituée de conversations téléphoniques captées par un scanner. Le visiteur est installé en face de l'écran sur un sofa. L’œuvre ne vise pas à lui évoquer la paranoïa des dispositifs de surveillance, mais la capacité de la conversation à être intégrée au processus filmique de narration tenté ici. Film sans image, la projection n’a pas d’issue logique : la multiplicité des paroles « volées » rend plus qu’incertaine l’apparition du mot « fin » (cf. « Pierre Huyghe : Daily – 1996 », communiqué de presse de la Galerie Roger Pailhas, Marseille).

Mobil TV (au départ appelée Easy TV) a été conçue à partir de la création d’une chaîne de télévision locale diffusée depuis le Nouveau Musée/Institut, Villeurbanne, lors de l’exposition Aperto en été 1995. Ses programmes étaient composés d’images et d’entretiens sur la réalisation du projet ainsi que d’actions courtes organisées par Pierre Huyghe et l’équipe de tournage.
Parmi les thèmes du programme 33 :
. WARGAMES est une fiction qui utilise comme plateau de tournage le Nouveau Musée/Institut, Villeurbanne, une personne se déplace avec une machine de nettoyage dans un lieu abstrait, il s'agit d'un jeu. Le système de surveillance de l'institution est utilisé de la même manière qu'une table de montage direct pour un match de football. Le réalisateur tente de cadrer l'acteur qui cherche à lui échapper.
. REMAKE est un remake de Fenêtre sur cour d'Alfred Hitchcock (même cadrage, même texte, même montage...).
. VERSION INTERNATIONALE : une bande son sans dialogues, un film sans image, un écran blanc. Il s'agit de l'histoire d'une journée.
. CASTING : annoncé dans la presse et les radios locales, il invite à venir danser durant une minute devant la caméra sur de la Dance Music en vue d'une sélection.
. VIDEO DE DEMONSTRATION vérifie le fonctionnement de certains objets en vente dans les grandes surfaces dont la vidéo nous montre l'usage.
. FETE : de son début jusqu'au matin une caméra est donnée aux invités d'une fête dans un appartement.

L’œuvre Mobil TV peut être présentée dans le cadre d’un programme de chaîne de télévision ou dans le cadre d’une exposition. Le spectateur est alors « installé » avec un programme pour visionner les cinq bandes vidéo sur un appareillage écran de petite dimension.
La société impose des comportements et des modes de vie réglés par toute une série de scénarios : un projet comme Mobil TV se propose de les devancer en mettant en œuvre et en démontrant l’existence possible d’autres types de pensées ou d’histoires. Pour cela, la production d’événements et d’images sert à impliquer le spectateur dans la création d’actions se déroulant à la fois dans le présent et dans la durée.