Basserode

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Si les œuvres de Basserode se situent par rapport au XXe siècle finissant, elle se rapportent surtout à ses impasses, comme si elles voulaient cependant moins les dénoncer que les ouvrir à un improbable et pourtant inévitable avenir. Elles semblent trouver leur source dans des réflexions menées autour de notions comme celles de mémoire, de nomadisme, de nature ou de temps, notions qui se révèlent être la matière même des œuvres. Si ces notions ont donc une vertu et une puissance ici, c'est qu'elles ne sont pas seulement des mots ou des choses mais les avant-courriers de l'événement de l'œuvre.

Que ce soit Hécatée, le bateau, la Mémoire mobile vivante, les têtes des Fragilités, les impasses-ouvertures de Tohu-bohu, tout nous parle ici non d'un trajet mais d'une avancée dans une zone inconnue, d'une exploration multidirectionnelle de cet espace, d'une invention et d'un déchiffrement simultané de ses courbures et de ses plis aux accents nouveaux.

Qu'entendre donc par nomadisme? Ce mot renvoie à quelque chose qui ne fait pas ou plus partie de notre civilisation. L'errance et le voyage peuvent y être perçus comme une forme de culture, il n'en reste pas moins que l'on refuse à ceux qui auraient adopté le nomadisme comme mode de vie, toute puissance civilisatrice.

Le nomade est un sujet à inventer, l'une des figures possibles de l'avenir de la pernsée et de la création au commencement du XXIe siècle et non pas bien sûr une figure idéalisée du passé. Le nomade est celui qui prend en charge dans le même mouvement sa personne et son devenir, son trajet et le monde qui l'entoure. Il ne sépare en rien ces sphères ni ne les oppose, mais pense constamment à maintenir vivant leur lien qui est précisément la condition de sa survie, de sa vie.

Ainsi, lorsque Basserode présente le squelette d'un sanglier portant en lieu et place de ses viscères la trace de ses frayages, de ses errances, il nous invite à chercher dans nos chemins non dans les lignes géométriques d'une intériorité abstraite mais à travers le déchiffrement des ébranlements éprouvés lors de nos courses folles ou de nos stations intempestives sur le chemin de la vie. En d'autres termes, le nomadisme est pour Basserode ce qui lui permet de renvoyer dos-à-dos, la manière qu'on les idéologies d'assigner l'individu au seul cadre intangible imposé par la forme d'État et les normes qui le fondent, et les élans inconsidérés d'une liberté illusoire qui, de s'affirmer sans attache, se retrouve être le jouet potentiel de toutes les affabulations, de toutes les falsifications.

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imprimé le 21 novembre 2024 [22:13] depuis l'adresse IP : 3.21.21.209
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