Sensorium Tests

Dans Sensorium Tests, six comédiens rejouent une expérience scientifique réelle¹, testant les réactions d’un sujet capable de synesthésie tactile-miroir. Cette forme de synesthésie (du grec syn, « ensemble » et
aisthesis, « perception ») entraîne chez le sujet synesthète le ressenti d’un contact qu’il voit s’accomplir sur autrui, que ce soit une caresse ou une gifle. Dans le film, des objets anthropomorphes puis un homme font face à une femme dont on cherche à savoir si elle ressent sur sa joue le contact que subissent ces divers éléments. Fascinée par cette capacité empathique rarement considérée par les artistes, souvent plus intéressés par le phénomène de l’audition colorée, Daria Martin a préalablement consulté de nombreux sujets, curieuse notamment de leur sensibilité face à des films. Parallèlement, Sensorium Tests montre deux scientifiques observant l’expérience depuis une cabine, à l’arrière d’une glace sans tain – métaphore du dispositif du cinéma. Dès lors, la synesthète qui leur sert d’objet d’étude ne devient-elle pas un objet tout court, soumis au voyeurisme d’individus, eux-mêmes susceptibles de percevoir son ressenti ?
Et nous-mêmes spectateurs du film, ne sommes-nous pas susceptibles de percevoir ce que nous montrent ces images animées ? Daria Martin sonde ainsi la capacité effective qu’ont les films, les rêves et l’imagination à modifier notre perception, notre vécu et incidemment notre subjectivité.

¹ S.J. Blakemore, D. Bristow, G. Bird, C. Firth and J. Ward, « Somatosensory activations during the observation of touch and a case of vision-touch synaesthesia », dans Brain, vol. 128, n° 7, juillet 2005, p. 1571-83.