Saverio Lucariello
Fantôme
1995
Tirage couleur, à développement chromogène, contrecollé sur PVC
50 x 75,5 cm
La photographie Fantôme, réalisée en 1995 et qui fait partie de la série Vanitas, s'accorde à cette idée de liturgie dénaturée. L'artiste s'y présente voilé dans un décor extérieur de nuit. Éclairé par la pleine lune et par une bougie disposée sur ce qui apparaît comme une table de fin de dîner, Saverio Lucariello, à la manière d'un fantôme bas de gamme, se couvre d'un drap blanc. Ne laissant voir que son visage, il tire la langue avec une certaine forme de défiance. Figure récurrente du panthéon de personnages de l'artiste, le fantôme partage avec le mage un caractère ésotérique empreint d'un mystère potache. Parfois saisi subrepticement à bord d'une brouette qui fait office de Fantômobile (série de 1996), ou surpris alors qu'il fait léviter des objets (Fantôme tendance orientaliste, 1995), le spectre est montré stoppé dans la paradoxale platitude de son quotidien surnaturel. Dans cet univers burlesque, il se présente incarné, vivant sa vie parallèle au milieu du monde, tentant de s'en accommoder à défaut de lui échapper.
Fantôme, sorcier, athlète, malade, rieur... les figures qu'épouse Saverio Lucariello sont « des lieux de circulation, écrit Christophe Kihm, des médiums de diffusion, des véhicules de pensée de l'art, de sa vanité, de son désir ou de sa perte.... Elles sont des propositions esthétiques temporaires. Ce que confirment ces personnages lorsqu'ils parlent ou qu'ils chantent et que leurs ritournelles soutiennent des formes d'enthousiasme, de raillerie ou de cynisme, qui pointent explicitement du doigt la force ou la faiblesse de certains choix ou de certaines propositions esthétiques. (…) Le processus mis en place par Saverio Lucarellio est ouvert à toutes les expérimentations2. »
2 Christophe Kihm, « Les trucs de Saverio Lucarellio », dans Saverio Lucariello. Milan : Artshow Edizioni, 2003