Née en 1963 à Rio de Janeiro (Brésil)
Vit et travaille à Vancouver (Canada)
Philosophe et universitaire de formation, Denise Ferreira da Silva articule pensée théorique, activisme politique et pratique artistique. Elle enseigne à l'Université de Colombie Britannique à Vancouver, dont elle dirige l'Institut pour la justice sociale, de genre, race et sexualité. En 2022 et 2023 elle est titulaire de la Chaire internationale de philosophie contemporaine de l’Université Paris 8. Également autrice et éditrice, elle a écrit de nombreux ouvrages dont Toward a Global Idea of Race (UMP, 2007) et Unpayable Debt (Sternberg Press, 2021). Son travail artistique a été présenté dans le monde entier, notamment au MacBA Barcelone en 2021, avec Valentina Desideri ; à la Biennale de Lubumbashi (RDC) en 2022, avec Arjuna Neuman ; à la 35e Biennale de São Paulo en 2023.
La pensée philosophique et politique de Denise Ferreira da Silva déborde du cadre strictement universitaire pour trouver des développements inédits à travers d'autres modes d'expressions – lectures, poésie, vidéo, théâtre, performance. De ces différentes formes résultent des œuvres ouvertes et collaboratives : un art relationnel qui déplace sans cesse les frontières entre théorie et pratique pour refonder la pensée à partir des sens, des émotions, de l'intuition et du dialogue.
Subvertir les formes même de l'art est le sens d'un projet anticolonial dans son ensemble ; les pratiques artistiques doivent aller au-delà de l'objet, de la représentation et du discours pour devenir des études en acte ; c'est ainsi qu'avec Valentina Desideri, Denise Ferreira da Silva imagine The Sensing Salon, une série d'ateliers visant à expérimenter des modes alternatifs de connaissance et de guérison, comme le tarot ou le reiki. En réaction à la pensée classique occidentale fondée sur la raison, Ferreira da Silva élabore une « poéthique » qui articule théorie féministe noire et critique du capitalisme extractiviste. En 2023, elle présente à la Biennale de São Paulo Metaphysics of the Elements – The Studio, un environnement évolutif où se déroulent des discussions, des lectures et des performances. Le mobilier en forme de polyèdres permet la reconfiguration de l'espace en fonction des événements, comme un ensemble de particules élémentaires se combinant à l'infini, en vue d'une transformation radicale du monde et des modes de pensée.
Né en 1984 au Royaume-Uni
Vit et travaille à Berlin (Allemagne)
Arjuna Neuman est artiste, réalisateur et auteur. Il a étudié le film et la vidéo au Californian Institute of Arts à Los Angeles dont il obtient le diplôme en 2011. Ses œuvres ont été présentées à l'occasion de grandes biennales internationales comme celle de Sharjah (2016-2018), de Berlin (2018) ou encore la Biennale industrielle de l'Oural (2021). Il a également exposé à la Kunsthalle Wien en 2023 avec Denise Ferreira da Silva, au MACBA Barcelone la même année et au CCA Glasgow en 2021. Il contribue à de nombreuse revues sur l'art, notamment au journal en ligne e-flux.
A partir de différents types d'images filmées – prises de vue captées par l'artiste, images d'archive, modélisations 3d, vidéos de drones militaires – Arjuna Neuman compose une sorte de puzzle visuel et mental qui, tout en évoquant le documentaire, en évacue le didactisme pour se focaliser sur les sensations éprouvées par le spectateur. La vidéo First Fugue (2013) est ainsi construite sur un montage « irradiant » qui « contamine le subconscient ou la part pré-subjective de l'expérience du spectateur. [...] le résultat est une sorte de rêve-documentaire. »(1) La dimension sonore participe également de cette expérience plus affective que réflexive par un tissage subtil d'interviews, de sons en prise directe et d'extraits musicaux. Dans Syncopated Green (2022), la musique, davantage qu'un fond sonore, devient le sujet du film. En tant que contre-culture, la musique rave forme le contre-champ d'une représentation idéalisée et conservatrice des campagnes anglaises. En inscrivant l'histoire des free parties dans une tradition de représentation du paysage entre cottages et verdure, Arjuna Neuman en fait une arme politique, qui donne à entendre et à voir des récits alternatifs, inclusifs et festifs.
Depuis 2016 et le film Serpent Rain, Arjuna Neuman travaille avec la philosophe Denise Ferreira da Silva sur un cycle d’œuvres qu'ils qualifient de « cinéma élémentaire ». En retraçant des liens entre l'histoire humaine et les ères géologiques, leurs films abolissent les échelles de temps, en mettant en parallèle une révolution et un tremblement de terre, l'exploitation des ressources fossiles et l'esclavage, les migrations humaines et celles de la matière. Ensemble, ils élaborent un cinéma de la circulation de la transformation, qui nous révèle un monde profondément interconnecté.